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" Durant un après-midi, Deva et moi sommes allés visiter un autre bidonville. On a rencontré une petite fille vêtue d'un saree rouge et coiffée de deux tresses. Elle a arrêté de pomper de l'eau pour nous saluer. On lui a demandé de nous indiquer qui, parmi les enfants de son quartier, travaillait dans les tâches domestiques. Elle nous informa qu'elle était la seule de son quartier. Les autres travailleuses ont quitté leur famille pour demeurer chez leur employeur. Deva lui a demandé si je pouvais lui poser quelques questions. Un peu timide et hésitante, elle nous a invité chez elle pour demander la permission à ses parents. Son père était d'accord.
Elle s'appelle Kavitha, elle a 14 ans et travaille depuis six ans. Elle travaille durant trois heures le matin avant d'aller à l'école et, après l'école, elle retourne chez son employeur pendant trois autres heures. Kavitha n'a qu'une journée de repos par semaine; le dimanche. Elle a pris elle-même l'initiative de travailler pour améliorer les conditions familiales. Le métier de son père est instable, il travaille dans la construction de maison, et sa mère est mère au foyer. Ainsi, son petit frère de 12 ans et sa sœur de 9 ans, dépendamment des périodes de l'année, ne mangent pas toujours à leur faim et sont menacés de devoir quitter l'école.
A ses débuts, Kavitha ne gagnait que 150 roupies par mois, ce qui est un peu moins de 4$US. Aujourd'hui, elle reçoit 6$US par mois. Kavitha ne dépense aucun sous de son salaire, elle le remet entièrement à sa mère.
Kavitha représente l'image parfaite de la fille indienne. Soumise, docile, calme, soignée et généreuse. Elle souhaite devenir docteur pour soigner les pauvres gratuitement. Si elle n'a pas la chance de recevoir une éducation lui permettant d'accomplir ses ambitions, elle continuera à travailler en tant que domestique. Elle ne se plaint pas de sa situation et elle dit même que son patron est très gentil et juste, bien qu'elle ait souvent des tâches supplémentaires compte tenu d'une petite erreur commise.
Pour elle, son rêve de carrière est irréalisable puisque son père veut la marier dans deux ans, lorsqu'elle aura atteint l'age de 16 ans. Elle préférerait se marier à 21 ans. Si elle avait le choix entre obéir à son père ou suivre ses désirs, elle écouterait son père sans hésiter.
J'ai demandé à Kavitha si elle avait une histoire à me raconter. Elle me raconta ce qu'elle avait lu dans la Bible. Un jour, Dieu ordonna à Jonnah de prier pour le prestige d'une ville nomme Ninive (ou quelque chose dans le genre). Jonnah, non intéressé, monta à bord d'un bateau se rendant dans une autre ville. Lors de la traversée, une immense tempête menaça le bateau de chavirer. Alors, les passagers affolés demandèrent à Dieu des explications. Dans la mer, les passagers lurent le nom de Jonnah. Jonnah fut donc accusé d'avoir pêché et d'être responsable de cette tempête. Les passagers jetèrent Jonnah à la mer pour apaiser la colère de Dieu. Une grande vague le submergea. Trois jours plus tard, Jonnah échoua sur une terre. Il était arrivé à Ninive.
La morale de cette histoire, comme l'a dit la petite Kavitha, c'est qu'il faut toujours obéir a son supérieur.Après cet entretien, j'étais très surprise que le père de Kavitha cherche à marier si vite une fille si obéissante et qui, en plus d'être une enfant modèle, rapporte des sous à la maison. Deva m'a expliqué que lorsque les indiennes arrivent à maturité, ce qui correspond au moment de leur première menstruation, elles sont une honte pour la famille. Si elles restent à la maison, les voisins se moquent de la famille en question. Garder une fille mature a la maison, c'est sous-entendre que la petite est trop importante pour partir et qu'elle a droit a des privilèges… "
Geneviève