Une journée de « tourisme équitable »

 

Ce matin, Uma m’a proposé de me joindre à un groupe de « volontaires » Japonais qui venaient rendre visite à Jeeva Jyothi pour une journée de « tourisme équitable ». Assez sceptique sur ce que cela pourrait donner, j’ai accepté. Le groupe arrive, composé d’une quinzaine de japonais et de leur guide. Les participants ont de 25 à 70 ans. Ils s’installent dans la grande salle de Jeeva Jyothi et Susai Raj vient prononcer un discours d’accueil. James enchaîne sur la présentation des activités de Jeeva Jyothi. Les Japonais sont très curieux et posent de nombreuses questions. Nous regardons deux films : un sur l’usine de papier et un autre sur la situation des enfants dans les usines de briques. A midi, nous allons manger dans un restaurant à la gare de Perambur. Les Japonais prennent tous des menus végétariens, je les imite donc. Comme d’habitude c’est extrêmement épicé… Mais nos hôtes s’en donnent à cœur joie et à notre grande surprise –à James et à moi qui mangeons consciencieusement avec notre fourchette- ils mangent tous avec les mains ! Bon, on ne recule devant rien pour s’intégrer. Après le repas, nous partons visiter l’usine de papier. A plus d’une heure de Madras dans le petit village de Kollapuram, l’usine est un grand hangar de tôle qui fonctionne de manière très traditionnelle. L’usine emploie une douzaine d’hommes et de femmes et parfois quelques personnes supplémentaires en cas de grosses commandes. Ils forment aussi les personnes désireuses de créer elles-mêmes leur unité de papier recyclé.

Après cette première visite, nous partons pour les Red Hills où nous rencontrons le personnel de Jeeva Jyothi qui travaille sur place. Puis nous nous rendons dans la salle du village où se réunissent les clubs d’enfants organisés par Jeeva Jyothi. Nous nous installons face aux enfants. Je me sens assez mal à l’aise parmi ces 15 Japonais à la pointe de la modernité, si bien habillés, - et si « déplacés »- dans cet environnement face à cette cinquantaine d’enfants débraillés et heureux de vivre, qui regardent ces étrangers avec curiosité. La séance commence. Evidemment ça ne ressemble en rien à une réunion habituelle. Les enfants défilent, petits et grands, garçons et filles, pour raconter leur triste quotidien aux touristes… Les Japonais prennent des notes et ça me laisse assez dubitative. Enfin un des garçons demande l’autorisation de poser une question : il désire savoir ce que ces Japonais viennent faire ici. La réponse est somme toute banale : l’ouverture aux autres, aux problèmes des pays en voie de développement…La séance finit et les enfants se jettent sur nous pour nous serrer la main. Nous reprenons le bus climatisé et retournons à Jeeva Jyothi. Là nos hôtes se jettent sur les produits en papier recyclé et en achètent pour des sommes considérables.

Quant à moi, je retrouve avec un plaisir non dissimulé mes petits protégés. C’est là, quand je fais écrire l’alphabet à ce petit cancre de Ravi de 5 ans, que j’aide Elongovan à déchiffrer son livre d’anglais ou que j’explique la différence à Gokul entre un pentagone et un hexagone que je me sens vraiment utile. Quant au tourisme équitable, je ne doute en rien qu’il réponde à une demande effective et qu’il représente une source de revenus non négligeable pour Jeeva Jyothi mais je considère que c’est une activité très délicate à mener pour qu’elle ne ressemble pas à du voyeurisme gratuit dans des zones de grande pauvreté.