Dimanche 27 Juillet, Chennai/Madras : Auprès des femmes de Ganesh Nagar |
Bonjour à tous, Je profite de mon
dimanche pour vous écrire, car c'est la seule journée durant
laquelle j'ai accès aux ordinateurs autrement qu'à l'aurore
(et dieu sait si l'aurore arrive tot en Inde !) ou tard dans la soirée.
En effet, si cela m'énerve beaucoup de ne pouvoir travailler de
facon éerieuse à cause de cette absence de matériel,
il faut reconnaitre que les Indiens ne sont pas avares au travail. En
heures de travail du moins, car je pense que nous n'avons pas tout à
fait les memes critères de productivité… Mais revenons à ce qui nous intéresse vraiment. Je n'ai pas énormement de choses à vous raconter car Deva a trés peu de temps pour me faire visiter les quartiers et car toutes les questions que je souhaite poser au directeur sont en attente du fait de son emploi du temps trés chargé. J'ai malgré tout réussi à accompagner Deva vendredi après-midi dans la zone de Ganesh Nagar qui reroupe des populations migrantes venues de zones rurales pour trouver du travail à Chennai. Les habitants sont en géneral dans des situations d'assez grande précarité en raison de leur récente arrivée et parfois de l'aspect transitoire de leur présence. Jeeva Jyothi a fondé ici des clubs de femmes et projette de mettre en place un Local Monitoring Committee par lequel les jeunes hommes du quartier pourraient s'atteler aux problèmes liés à l'eau, au ramassage des déchets ou la voirie (à l'image de celui qui existe dans Seminathaman Colony dont j'ai parlé précedemment). Deux groupes de femmes sont en place ici car la gestion de groupes réduits est plus efficace et propice à leur cohésion. Ces groupes fonctionnent bien, ils ont amassé de jolies sommes sur leurs comptes et sont meme parvenus à obtenir un prêt de 5000 roupies du gouvernement. Chaque femme a un projet different telle la production de savon ou de poudre de curry que cet emprunt va permettre de mettre en oeuvre. Elles me disent que le grand changement que leur a apporté ce groupe est d'avoir plus de poids auprès des instances étatiques et des banques et d'apprendre à mettre en commun pour permettre à celles qui en ont besoin de réaliser leurs projets. La preuve de leur entente est que l'une d'entre elle a mis en place ce que Jeeva Jyothi nomme des 'vocational trainings', des formations professionnelles au cours desquelles elle enseigne la couture a 25 femmes dont 10 sont déja devenues des couturières indépendantes. Leur condition de femme et d'épouse est bien differente de celle des membres du club de Subramani Taottam : leurs maris sont d'accord avec leur participation (meme si le fait qu'ils aient du donner leur 'permission' sonne toujours trés mal à nos oreilles) et toutes travaillent. Elles font partie de ces femmes comme on en voit des centaines en se promenant dans les rues de Chennai, vendant des fleurs tressées, des snacks, des fruits, de l'encens ou des vetements, assises sur les trottoirs et enroulées dans leurs saris colorés. Cependant, une fois encore, il apparait au fil de la discussion que l'homme commande et autorise et que leur plus grande satisfaction eu égard à la constitution de ce club est la possibilité de sortir des murs de leur foyer, de se rencontrer et d'échanger. La grande réussite
de Jeeva Jyothi par rapport à ces groupes de femmes est donc moins
financière que sociétale et culturelle ; l'ONG a permis
aux femmes de se retrouver et de vaincre une solitude qui leur pesait
tant, surtout parmi ces populations de migrants coupées de leurs
racines. Au delà de leur épargne, de leurs prets et de leurs débats sur le futur de leurs enfants, ces femmes sont également actives au sein de leur communauté et se battent pour obtenir l'éclairage des rues et des réservoirs d'eau potable. Elles parlent ouvertement de leur incapacité à financer ces projets elles-memes et de leurs griefs contre le gouvernement qui ne réserve pas d'aide aux plus pauvres. Le travailleur de Jeeva Jyothi s'insurge alors contre les malentendus et la désinformation et explique que le fonds du problème est loin d'etre le gouvernement qui alloue effectivement des aides considérables mais la corruption des partis politiques qui captent les subventions avant qu'elles ne parviennent aux interessés et qui refusent d'éduquer les masses pour qu'elles sachent où s'adresser pour obtenir ces subsides. Les femmes acquiescent mais leurs problemes demeurent, gouvernement ou pas. Nous nous quittons comme d'habitude avec de grands sourires et des remerciements, elles, ravies d'avoir pu faire partager leur fierté et leurs projets et moi, heureuse d'apprendre tant et de me sentir utile en vous faisant connaitre leur grandeur à elles. A trés bientot,
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