Jeudi 24 Juillet, Chennai/Madras : Les cours du soir de Surya

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Mais je voudrais revenir sur la journée d'hier que je n'ai pas eu le temps de vous raconter en entier.
Vers 16h, nous nous sommes rendus avec Deva dans le quartier de Subramani Taottam où vivent des familles de coolies, de vendeurs de fleurs ou possédant de petits magasins. Musulmans et Hindous ne s'y mélangent pas, mais vivent apparemment sans hostilité ni conflit. JJ a initié dans ce quartier des cours du soir pour éviter les cas d'abandon et d'échec scolaire et les travailleurs sociaux continuent leur campagne d'enrolement pour l'école mais encore un certain nombre d'enfants refusent cette perspective. Contrairement au quartier des fabricants de chaussures, le problème semble moins etre ici le besoin de la participation de l'enfant au travail familial pour survivre que la volonté des enfants eux-memes qui ne trouvent aucun intéret dans l'école et préfèrent gagner quelques roupies pour acquérir une certaine indépendence. Je suis totalement dépourvue de solution face à ce genre de comportement et Deva confirme la quasi impossibilité de mener ces enfants sachant à peine lire et écrire sur les chemins de l'ecole.
L'originalité des cours du soir à Subramani Taottam est qu'ils sont delivrés non pas par un professeur de JJ mais par des éleves eux-memes que l'ONG a formé à ce genre de travail. Deva me présente avec fierté Surya, 15 ans, étudiant en 11e standard (la plupart des enfants ne vont pas au delà du 10e) qui fait seul la classe deux heures chaque jour à près de 25 enfants agés de 6 a 15 ans. Ils s'installent au pied du temple de Siva, avec le ciel pour seul infrastructure, et Surya distribue à chacun lectures, devoirs et conseils. Je suis impressionnée par sa ferveur et son assurance. Il me dit combien il aime enseigner et combien il doit à Jeeva Jyothi. Ce qu'il ne sait pas encore, c'est que l'association compte l'employer comme professeur de cours du soir au terme de ses études tant les stages de formation en ont fait un bon professeur.

Il me fait visiter sa maison, au 5e ou 6e étage d'un immeuble sans eau courante. Toute la famille vit dans ces deux pièces sombres et noires de suie que les offrandes de fruits et de feu à l'icone de la mère déesse occuppent pour moitié.
Surya est un personnage, il m'impressione plus encore lorsqu'un homme important du quartier vient insulter Deva et les enfants assistant aux cours du soir car il refuse l'ingérence de l'ONG. Les deux membres de JJ demeurent calmes (pendant plus d'une heure, tout de meme) et expliquent posément les ambitions et les réalisations de l'organisation. C'est trés difficile dans ce quartier car un travailleur de JJ aujourd'hui licencié a soutiré et volé de l'argent aux enfants qui aspiraient à mettre en place un fonds commun comme dans tous les Children's Club. Il est donc fondamental aujourd'hui de regagner la confiance des enfants mais surtout des pères plus prompts encore à s'opposer au moindre changement.

J'ai également eu la chance de rencontrer à Subramani Taottam mon premier Women's Club au complet, une création toute nouvelle dans ce quartier et qui a l'air de trés bien fonctionner. Nous avons eu un échange fantastique avec ces 10 femmes qui avaient l'air si heureuses de se retrouver. Il est toujours impressionnant ici de voir à quel point des femmes qui ont de telles difficultés financières font montre d'une élegance et d'une coquetterie sans pareil. Nous avons beaucoup ri et elles m'ont parlé de leur vie et de leurs enfants. Mais ne déflorons pas le sujet tout de suite car je vous prépare un court article sur les Women's clubs de Jeeva Jyothi dont elles seront les principales héroines…

Merci une fois encore de votre attention,
J'attends de vos nouvelles,

Anne-lise.