Article 1 : Former les ailes de l’évasion…

Note : Concernant la zone des usines de riz, je vous renvoie à une traduction/résumé d'un dossier complet de JJ sur le problème du Bonded Labour* dans ces usines de riz.

*Je lance un appel aux traducteurs potentiels pour Bonded Labour, pour les autres, je vous propose une traduction médiocre de Travail par contrat d'endettement..

 

Former les ailes de l'évasion..

Projet de Jeeva Jyothi pour lutter contre le travail de contrat par endettement des enfants à Chennai/Madras.

Au nord de Chennai, à quelques mètres de la route nationale qu'empruntent des milliers de camions pollueurs et bruyants chaque jour, on trouve la zone des Red Hills qui doit son nom a la couleur de sa terre et sa composition rocheuse. Red Hills n'est pas connu ici pour la couleur de sa terre mais pour les usines de riz qui y sont installées et qui ont mis en place un système organise d'esclavage moderne, que l'on appelle Bonded Labour, travail par contrat d'endettement. Dans un rayon de 8 Km, environ 100 familles, majoritairement issues de tribus ou des castes les plus basses, sont prises au piège de ce système.

Un esclavage déguisé

Le travail par contrat d'endettement est probablement la forme la moins connue mais la plus répandue de l'esclavage d'aujourd'hui. Il se définit par le fait que l'employé travaille pour rembourser un prêt qu'il a contracte auprès de son employeur. Au départ, il s'agit souvent de personnes dans des situations financières critiques ont qui des agents envoyés par les propriétaires des usines offrent un prêt permettant de sortir la personne de l'impasse dans laquelle  elle se trouve. Cependant, le taux d'intérêt reste cache [les employés sont la plupart illettrés et pas habitues à ce genre de choses] et le nouvel employé se trouve oblige de travailler pour son créditeur pour rembourser sa dette. Ce travail consiste à passer des heures en plein soleil à étaler du blé sur un sol brûlant pour le faire sécher. Les conditions sont quasi inhumaines, 7 jours sur 7, rarement plus de 3 jours de vacances par an, une exposition au soleil et a une température trop élevée qui crée de graves problèmes de santé... Le salaire est si bas et le taux d'intérêt si élevé [souvent 1000 % par an]qu'il est impossible pour les familles de rembourser leur dette. Elles sont alors condamnées à rester toute leur vie entre les murs de l'usine [les sorties ne sont que rarement autorises, jamais pour sortir de la ville] et les enfants connaissent alors le même destin.

Les enfants, premières victimes

En effet, les enfants sont à leur tour pris dans un piège infernal. Etant enfermes dans l'enceinte de l'usine, ils sont confrontes aux même conditions de vie : problèmes de santé dus à l'exposition à la chaleur, au manque d'hygiène, de nourriture... Les familles vivent dans des cases, sans cuisine, sans toilettes, sans eau potable.. Les problèmes de santé [peau, yeux, poumons] sont catastrophiques.

Mais bien souvent les enfants n'ont aucune conscience de leur situation car ils ne connaissent que cette vie la. Ainsi des le plus jeune age leur esprit est forme de manière à devenir à leur tour des travailleurs esclaves. Seule une minorité [32 %] va à l'école et sans intervention extérieure comme celle de Jeeva Jyothi, ce chiffre irait en diminuant. De plus, même les enfants qui ont la chance d'aller à l'école passent le reste de leur temps à aider leurs parents ou à travailler dans l'usine. Ainsi, lorsque les parents meurent ou ne sont plus en mesure de travailler, la dette est automatiquement reportée sur les enfants et le système peut se poursuivre sur plusieurs générations.

Des conditions de travail inhumaines

Le travail dans l'usine est véritablement insoutenable, avec 14 a 18 heures de travail par jour, 7 jours sur 7. Il se fait par 4, souvent en famille.

Chaque famille est payée par sac de riz complété et la rémunération est de 7 rupees [0.15 E / 1 F]par sac. 7 a 10 sacs peuvent être completés par jour. Une famille dont 4 membres travaillent gagne donc 50 a 70 rupees par jour [1 a 1.5 E /7 a 10 F]. Le propriétaire vend chaque sac pour environ 150 rupees, ce qui fait un bénéfice exorbitant. Le salaire mensuel moyen d'une famille est entre 2000 et 3000 rupees [43 et 73 E] sur lequel 50% est automatiquement déduis pour le remboursement de la dette. En fait, le contrat entre le propriétaire et le travailleur est rarement écrit et le taux d'intérêt souvent cache. Il faut ajouter que ce travail n'est possible que 9 mois de l'année, de janvier en septembre. Les trois mois des plus froids, les familles ne sont pas autorisées à chercher un autre travail temporaire ni à aller voir leur famille. Le système de dette s'alourdit encore puisque durant ces 3 mois, les familles sont obligées pour vivre d'emprunter encore a leur propriétaire. Lors de tentatives de fuite, rendues difficile par les hauts murs des usines, les représailles sont violentes et sévères.

La position de Jeeva Jyothi

Pour Jeeva Jyothi, il est d'autant plus urgent d'agir que le problème s'amplifie. Les études que l'ONG a réalisé dans la zone montrent que 20 nouvelles usines se créent chaque année. En effet, ces usines génèrent un profit considérable du a un environnement abandonne par les autorités locales, dans les cas ou il n'y a pas de corruption, une situation géographique loin de la ville et de la pression publique, une main-d'oeuvre désespérée abondante qui arrive de régions éloignées essentiellement la partie rurale du Sud ou l'agriculture connaît une grave crise.

La priorité de Jeeva Jyothi reste les enfants. On estime qu'après 7, 8 ou 9 ans, les enfants de ces familles, n'ayant jamais été à l'école perdent pratiquement toute chance de sortir du système car ils sont complètement inadaptés mentalement et socialement a l'école. De plus, n'ayant pas conscience de leurs droits, ils reproduisent la vie de leurs parents sans aucun moyen de négociation.

Que dire des propriétaires qui savent mieux qui quiconque que ce type de contrat mène droit a l'esclavage ? Que dire aussi du Gouvernement qui ne fait rien pour lutter contre ce phénomène ? Que faire ?

Les actions de Jeeva Jyothi

Pour éradiquer ce fléau, il faut des efforts intelligents et assidus sur de nombreux fronts, de la mobilisation du Gouvernement au partenariat entre ONG et acteurs sociaux, en passant par la prise de conscience au sein de la société...

Jeeva Jyothi propose une solution de long terme ciblée sur les enfants.

Au lieu d'une approche agressive, JJ préfère une approche coopérative. L'ONG pense qu'il vaut mieux donner aux plus jeunes les moyens de s'en sortir par eux-mêmes. Cette intervention doit se faire des le plus jeune age. C'est la raison pour laquelle Jeeva Jyothi a crée plusieurs crèches autour des usines pour accueillir les enfants de 1 a 5 ans. La crèche leur permet d'acquérir des bases pour intégrer une école par la suite et leur donner un minimum de prise de conscience de leurs droits. L'idée intéressante est que les parents, comme les propriétaires ne s'opposent pas aux crèches car cela les enfants de cet age ne travaillent pas et sont plus une charge qu'autre chose. De plus, souvent ce sont les grandes soeurs qui doivent s'en occuper, en les libérant cela leur donne une chance de plus d'aller à l'école.

Parallèlement, un climat de confiance est mis en place par les travailleurs sociaux a la fois avec les parents, les propriétaires des usines et les autorités locales pour faire évoluer les moeurs et accepter l'idée d'éradication du travail des enfants. L'évolution à ce niveau reste très lente, et les travailleurs sociaux reçoivent encore des menaces de certains propriétaires. Cependant, certains se montrent plus compréhensifs et coopératifs et reconnaissent petit a petit les droits des enfants.

 

Jeeva Jyothi est la seule ONG qui travaille pour ces familles. Cela fait maintenant 3 ans qu'ils sont actifs et le nombre de crèches est monte jusqu'a trois. Parallèlement des cours du soir [centres d'éducation non formelle] ont été mis en place pour tous les enfants et les familles ont été encouragées à s'investir et à créer des groupes d'enfants, de femmes et des comites locaux pour prendre en charge collectivement les problèmes de leur communauté.

Environ 200 enfants ont été intégrés dans les écoles publiques. Les travailleurs sociaux ont aussi aide les familles dans leurs démarches auprès des autorités locales, en tant que médiateurs et conseillers.

Beaucoup de travail reste à faire, mais le dévouement et l'efficacité des équipes de Jeeva Jyothi semble porter ses fruits. Combien de générations seront passées avant de pouvoir rêver d’un autre destin ?

 

A suivre : les lignes directrices des travailleurs sociaux de JJ dans leur approche des enfants des usines..

 

Données-clés (2001) :

-1000 familles - 1600 enfants impliqués

-201 usines de riz [kalam] : le nombre d'usines est en augmentation

-816 enfants de 6 a 14 ans : 68 % travaillent et ne vont pas a l'école.

-dette : de 5000 a 50000 rupees [100 à 1000 Euros]

Taux d'intérêt non dévoilé par les patrons [souvent 1000 % par an]

Salaire mensuel moyen : 2000 à 3000 pour une famille de 4 travailleurs pour 9 mois seulement et avant la déduction de la charge de remboursement.